En cette fête du Christ Roi de l’univers, nous avons entendu un très beau texte de saint Paul. Il s’agit d’une hymne d’action de grâce adressée au Père mais centrée sur Jésus Christ : "Rendez grâce au Père qui vous a rendus capables d'avoir part à l'héritage des saints." Dans ce texte, il y a un mot très important qui revient six fois, c'est le mot "tout" : "En lui, tout a été créé… Tout a été créé par lui et pour lui…" Ce mot désigne le cosmos c'est-à-dire l'univers entier. Saint Paul insiste très fortement sur l'universelle souveraineté du Christ et sur son autorité absolue.
Cette insistance a une raison : A travers son message, Paul voulait rejoindre les chrétiens de Colosses. Ces derniers avaient du mal à résister aux courants spirituels et philosophiques à la mode. Il voulait leur recommander de ne pas suivre tout ce qui se disait autour d'eux, surtout quand cela portait atteinte à la prééminence du Fils de Dieu. C'était à un tel point que le Christ n'était plus reconnu comme le Verbe créateur et l'unique Sauveur. Face à ce péril, l'apôtre Paul réaffirme avec force et fermeté qu'il a plu à Dieu de tout réconcilier par le Christ.
Bien sûr, il nous est bon et même nécessaire de relire cette épître dans notre contexte actuel. Comme autrefois, les chrétiens d'aujourd'hui sont sollicités par toutes sortes de spiritualités complètement tordues, par exemple le new age, la sorcellerie mais aussi les sectes en tous genres. Nous sommes également affrontés à l'incroyance, l'indifférence, la mal croyance. Si nous voulons tenir bon, il nous faut revenir au cœur de la foi et remettre le Christ au centre de notre vie et de notre prière. La lucidité et la vigueur de Paul nous sont plus que jamais nécessaires. Nous avons sans cesse à sortir de nos idées toutes faites et de nos certitudes pour nous convertir au Christ.
Les deux autres lectures de ce jour, celle d'Ezéchiel et l'évangile nous présentent Dieu comme un berger face à son troupeau. Ezéchiel nous parle d'un troupeau abandonné, accablé, maltraité et malade. Pour le berger qui voit ça, c'est un grand malheur. Mais le Seigneur ne l'abandonne pas. Il s'engage à tout faire pour en prendre soin, le guérir, le fortifier et le protéger. Dans l'évangile, nous avons le récit du jugement dernier : "J'ai eu faim et vous m'avez donné à manger… J'étais un étranger et vous m'avez accueilli…"
D'un côté, nous voyons la délicatesse de Dieu envers Israël qui est comparé à la brebis perdue, blessée ou malade. Dans l'évangile, nous découvrons le comportement de l'homme envers son semblable qui est affamé, assoiffé, étranger, nu, malade ou en prison. Si Dieu s'affaire ainsi à l'égard des petits et des faibles, l'homme se doit d'en faire autant à l'égard de son semblable affamé, assoiffé, étranger, nu, malade ou en prison. Celui qui a bénéficié de la sollicitude de Dieu serait le dernier des derniers s'il se comportait autrement envers les malheureux. Les occasions ne manquent pas car nous vivons dans un monde ou les pauvres deviennent de plus en plus pauvres et de plus en plus nombreux.
En lisant cet évangile, les chrétiens apprennent qu'ils seront jugés sur ce qu'ils auront fait pour les plus pauvres et les plus démunis. C'est important pour nous de ne jamais oublier ces paroles du Christ. Mais une question se pose : Comment expliquer la surprise de ceux qui seront placés à droite et celle de ceux qui seront à gauche : Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir dans le besoin ? Les chrétiens qui ont lu et relu cet évangile connaissent bien ces critères du jugement. Ils ne pourront donc pas être surpris par ces paroles du Fils de l'homme.
Pour répondre à cette question, il nous faut relire cet évangile plus attentivement. Il nous dit dès le départ que "toutes les nations seront rassemblées devant le Fils de l'homme." Cette expression désigne toute l'humanité qui ne connaît pas le Christ et qui n'a jamais entendu son message. Nous comprenons mieux alors l'étonnement de ceux et celles qui entendront les paroles du Christ : Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir ? Tu avais faim… Tu étais étranger… Quand sommes-nous venus à toi ?
Cette révélation s'adresse à des hommes innombrables. Pour eux, ce sera la surprise d'apprendre qu'en servant l'un de ces petits qui sont ses frères, ils auront accueilli, nourri, vêtu, soigné et visité le Fils de l'homme lui-même. Du coup, les "frères" en question, ce sont les disciples de Jésus ; ce sont les chrétiens affamés, étrangers, nus, malades et en prison qui sont livrés à la miséricorde et à l'amour fraternel des "autres".
Bien sûr, cette consigne de partage vaut aussi pour nous chrétiens. Nous ne devons pas être les derniers à reconnaître le Christ dans celui qui souffre. Pour me faire comprendre, je voudrais partir de ce que nous voyons au cinéma. Dans un film, il y a beaucoup de mouvement. Et voilà qu’à un certain moment, on voit sur une dernière image le mot "fin". Le héros se fige. Plus rien ne bouge. C’est cela le jugement : nous vivons des tas d’activités bonnes ou mauvaises. Puis un jour, on écrira le mot "fin". D’un seul coup, notre image sera figée pour l’éternité. Nous serons jugés sur nos actes d'amour et par l'Amour.
En célébrant l'Eucharistie, nous venons puiser à la source de tout amour pour le transmettre aux autres. En ce Pain, nous recevons le Seigneur Jésus. Nous vivons par avance cette annonce ce saint Paul : "Dieu sera tout en tous."
D'après diverses sources
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