Bonjour Stéphane,
merci pour votre question.
D’abord je distinguerais le récit des « noces de cana » et la question des « outres neuves » ! Certes ici et là nous avons des récipients, mais dans les noces de cana nous avons à faire à des jarres de pierre énormes (qui peuvent atteindre jusqu’à 400 litres et qui sont normalement destinées aux ablutions et non au vin cf. Jn 2,6) et ailleurs (cf. Matthieu 9,17 ; Mc 2,22 ; Lc 5,37-38) il est question d’outres, comme :
« Personne non plus ne met du vin nouveau dans des outres vieilles; autrement, le vin fera éclater les outres, et le vin est perdu aussi bien que les outres. Mais du vin nouveau dans des outres neuves!" » (Mc 2,22)
Dans le Cours d’Initiation, quand je parle de Marie, il m’arrive de la comparer à l’ « Outre Neuve », comme aussi à la « Bonne Terre » de la Parabole du Semeur (Mt 13, Mc 4 etc). Dans ces exemples nous retrouvons ce que j’appelle
la bipolarité de la foi chrétienne : sujet et objet. L’objet de la foi est bien Dieu, le Christ, et le sujet, c’est chacun de nous. En effet, l’Outre neuve est destinée à contenir le Vin nouveau, c'est-à-dire l’Esprit Saint Lui-même, le Don de Dieu, le Christ etc. Et dans ce genre d’exemples (ou de paraboles) bipolaires, nous prenons conscience que l’être humain a besoin non seulement du Christ, mais de
la capacité de Le recevoir. Pour faire court, nous pouvons reprendre les expressions de saint Paul : « l’homme nouveau », ou encore « la créature nouvelle ».
L’homme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu. Quand Adam chute, l’homme perd la ressemblance d’avec Dieu, et son fonctionnement est désormais celui dit de l’homme ancien (coupé de Dieu, « à demi-mort » (Lc 10,30)) avec ses convoitises. Par contre, l’homme nouveau en nous c’est l’homme en qui la ressemblance d’avec Dieu est reformée, redonnée par le Christ. Tout le cheminement de croissance, de purification, de transformation (de sanctification, de divinisation) engendre en nous l’homme nouveau.
En cours de chemin, certes, nous devenons comme une femme enceinte de jumeaux, ayant en nous comme deux êtres qui combattent l’un contre l’autre : l’homme ancien et l’homme nouveau. Plus l’homme nouveau croît, plus l’homme ancien dépérit de lui-même. Et l’homme nouveau c’est le Christ en nous, c’est notre être transformé en Christ. L’homme nouveau en nous arrivé à la plénitude de l’âge du Christ peut dire avec saint Paul : « ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi ».
Pour revenir à votre question : l’outre est donc la capacité de recevoir Dieu. Si elle est ancienne (comme les trois premières terres de la parabole du Semeur (Mt 13)) elle ne peut recevoir la Semence, ou si elle la reçoit, cela ne fonctionne pas (l’outre se brise dans le cas de l’exemple des outres), elle ne donne pas du fruit. Or il est vital pour tout chrétien de porter des fruits, c’est d’ailleurs cela le sens de la vie chrétienne sur terre ! « je vous ai institués et je vous envoie pour que vous portiez un fruit et un fruit qui demeure en vie éternelle » dit le Christ. Ceci nous fait comprendre que la capacité de recevoir le Christ, de Le porter, de s’unir à Lui est fondamentale pour qu’il y ait une relation réelle et plénière avec Lui. Donc la capacité ancienne doit se renouveler, se transformer, se diviniser, pour être rendue capable de recevoir le Christ. En d’autres termes, la purification est nécessaire pour réaliser l’union avec le Christ.
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Votre question soulève la question de
l’interprétation des symboles dans la Bible. Pour cela, je dirais que toute lecture "symbolique" de tel ou tel passage, toute interprétation d'un passage qui se prête au symbole, ou à l'allusion, se doit de respecter quelques règles importantes:
1- Respecter la lettre du texte et ne pas la tordre dans un sens ou dans l'autre.
2- Respecter l'esprit du texte Sacré, où Dieu est l'Auteur, où l'Esprit Saint a quelque chose à nous dire, là où nous sommes, selon nos besoins du moment. Le recours au Credo (comme Règle) est important, c'est à dire que la lecture devrait être conforme au Credo, ou si vous préférez à la Foi de l'Eglise, ou encore, si vous préférez, à cette Nuée que chacun de nous a au dessus de soi et qu'il peut consulter.
Ceci vous donne déjà l'idée d'une certaine souplesse dans la lecture et dans l'interprétation, dans la compréhension du texte. Si votre lecture respecte ces deux conditions alors elle est bonne.
L'objectivité d'une lecture n'exclue pas l'objectivité d'une autre lecture (si toutes les deux respectent les deux Règles signalées plus haut).
Vu que vos deux suggestions ("système religieux" et "intériorité") sont tout à fait justes (respectent les deux règles) alors les deux sont également valables.
Si vous regardez de plus près, vous noterez le lien entre "système religieux" et "intériorité". Car le "système religieux" a pour vocation de susciter un certain type d'intériorité et de relation avec Dieu. C'est au final tout un. Juste deux angles différents d'une même chose.
J'espère que cette réponse est satisfaisante.
Si vous voulez lire un peu à ce sujet, vous pouvez consulter le Catéchisme de l'Eglise Catholique et ce qu'il dit sur la question de la Bible et de son interprétation: paragraphes 109 à 119 au moins.
bien à vous
priez pour moi
en Marie
Jean
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