L’évangile de ce mardi est un appel incontournable à pardonner, faire la paix et accueillir les gestes de paix de l’autre. Pour y parvenir, c’est vers notre Dieu que nous nous tournons. Livré aux mains des hommes, bafoué, torturé, le Christ a pardonné. Lui seul peut nous donner la force et le courage d’aller jusqu’au bout du pardon.
Aujourd’hui, Jésus compare Dieu à un roi qui remet une dette énorme à l’un de ses serviteurs. Dix mille talents, soixante millions de pièces d’argent : Une telle somme ne peut même pas se compter à l’époque. Les impôts, pour toute la Galilée au temps de Jésus rapportaient deux cents talents par an. La somme est si énorme qu’on se demande comment il en est arrivé là. Une dette de 10 000 talents était donc impossible à rembourser.
En nous racontant cette parabole, Jésus voudrait nous montrer où nous en sommes envers Dieu. Cette démesure de la dette remise n’est qu’une image de ce qui se passe entre Dieu et nous. Devant lui, nous sommes tous des débiteurs insolvables ; et pourtant, quand nous le supplions, il ne se contente pas de nous accorder un délai ; il va jusqu’à nous faire grâce, tout cela au nom de l’amour qu’il nous porte. Le pardon est donné pour ouvrir un avenir à celui qui n’en a pas d’autre possible.
Mais le pardon qu’il nous donne ne sera possible qu’à une condition : C’est que nous fassions preuve d’indulgence pour nos compagnons de route. Les cent deniers que doit le camarade, c’est insignifiant par rapport à l’énorme dette que le premier s’était vu remettre. C’est pour cette raison qu’il devait, à son tour remettre celle de son compagnon et retrouver son amitié. Ce pardon lui aurait donné l’occasion d’un nouveau départ sur de nouvelles bases.
La fin de cette parabole semble contredire ce qui est dit sur le pardon sans limite du Seigneur. En fait ce n’est pas Dieu qui refuse de pardonner. C’est l’homme au cœur dur qui devient imperméable au pardon de Dieu. C’est comme si on voulait arroser une terre sèche et aride. L’eau ne fait que raviner et ça ne sert à rien.
Quand nous disons le ‘Notre Père’, il n’est pas facile de dire : ‘Pardonne-nous comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés.’ Nous pensons à toutes nos rancunes d’ordre familial, dans le voisinage, dans la communauté paroissiale, au travail ou dans d’autres relations que nous pouvons avoir ailleurs. Mais ce pardon donné est une libération. Il ouvre à la paix, à la vie, à l’avenir et à l’amour. Le pardon donné fraye en nous un passage à la tendresse de Dieu.
Pierre pensait être très généreux en pardonnant jusqu’à sept fois (chiffre symbolique qui signifie sans limite). Jésus nous dit qu’il faut aller jusqu’à 70 fois sept fois. La mesure du pardon c’est d’être sans mesure. Le vrai pardon ne compte pas. On n’a jamais fini de se pardonner et d’être pardonné.
En définitive, c’est l’exemple du Christ lui-même qu’il nous faut regarder et suivre. Ce qu’il nous demande aujourd’hui, il l’a vécu jusqu’au bout. Avant de mourir sur la croix, il a dit : «Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ! » Par ses paroles et toute sa vie, Jésus nous dit ce qu’est le pardon : il ne s’agit pas d’oublier mais de tendre la main à l’offenseur pour l’aider à se relever. Pardonner c’est aimer. C’est repartir ensemble sur des bases nouvelles.
Notre Dieu est un Père qui aime chacun de ses enfants. Le plus grand désir d’un père et d’une mère, c’est que leurs enfants s’entendent bien et qu’ils soient unis. Au moment de régler nos comptes avec les autres, rappelons-nous toujours que nous sommes des pécheurs pardonnés, appelés à entrer dans cette logique de pardon et de réconciliation avec les autres.